L’urbanisation gagne de plus en plus du terrain vers ce qu’on appelait la campagne, et le développement et l’exploitation de ressources naturelles menacent la biodiversité. Des actions variées, souvent à fort prix, doivent être entreprises pour protéger cette nature et ses joyaux et ce, pour le bien commun de la société qui bénéficie de divers services écologiques qui en résultent. Au sein des différentes régions du Québec, des actions coûteuses sont souvent menées par des organismes de conservation dévoués et ce, à la limite de leurs capacités financières. Ces derniers se subventionnent principalement avec du financement gouvernemental limité et de quelques revenus de frais d’adhésion. Cependant, et heureusement, une bonne proportion de leurs recettes provient aussi de dons obtenus par des campagnes de financement variées et des sources de revenus tout aussi variées. Ce n’est pas tout. Outre les bienfaiteurs pécuniaires, qui sont ces autres bienf’acteurs qui permettent de façon tangible aux organismes de poursuivre leur mission vers l’atteinte d’un objectif d’aires protégées? Ce sont ceux qui font don de leur bien précieux, leur terre.
La conservation volontaire, plus spécifiquement par le don immobilier, c’est-à-dire le don d’une terre à des fins de conservation, peut être une façon moins commune mais complémentaire pour assurer la conservation des milieux naturels d’une région ou pour en connecter d’autres, en garantissant leur protection à perpétuité par l’organisme qui en fera la gestion. Le ou les propriétaires terriens qui font don de leur propriété à des fins de conservation participent énormément à la réalisation d’une telle mission. Ils sont dans l’ombre et pourtant, ils sont essentiels au développement d’un réseau de terres protégées en milieu privé, particulièrement dans certaines régions où les fonds publics, les terres disponibles à l’achat et même celles de l’État, se font rares.
Ces donateurs dans l’ombre des organismes de conservation, ce sont majoritairement des individus, typiquement décrits comme généralement aisés, retraités et membres chez un organisme de conservation (pour 88 % des dons). Les dons d’entreprise représentent 11 % des dons[1]; le don monétaire simple est facilement utilisé, par contre le don jumelé permet de sensibiliser autant l’employeur que l’employé d’une pierre deux coups. Les municipalités ou les organismes forment une autre catégorie de donateurs[2]. Malgré ce portrait hétéroclite, le désir de préserver la valeur intrinsèque des milieux naturels semble être la motivation première partagée de presque tous ces donateurs.
Ce n’est pas dans la nature des Québécois de léguer une propriété à des fins de conservation, ces derniers préconisent plutôt la formation de réserves naturelles, gardant ainsi une main basse sur la propriété. S’engager dans une entente de conservation est donc un geste très noble : propriétaires et organismes de conservation absorbent la majeure partie des frais de l’opération, alors que toute la société bénéficie des nombreux services écologiques maintenus[3].
Ces donateurs, ce sont M. Conochie et Mme Bourdon, qui ont fait un don écologique de 138 ha de milieux des plus diversifiés à la Fiducie de conservation des écosystèmes de Lanaudière pour en assurer la protection, ou la compagnie Domtar en Estrie qui, avec d’autres propriétaires, ont donné une partie des terrains qui forment maintenant la réserve naturelle des Montagnes Vertes à Conservation de la Nature Canada. C’est aussi M. Roy, promoteur immobilier, qui a contribué à la superficie du Boisé du Tremblay en offrant des lots de grande valeur qui lui appartenaient, et bien d’autres. Ce sont des regroupements ou des individus, qui se sont dit, comme la famille Larose, à Rougemont, que leur don est la meilleure façon de régler la succession et qu’ils espéraient que leur geste pourrait inspirer d’autres gens dans la même situation.
Chaque geste compte dans l’ensemble de l’œuvre. Don financier ou don écologique? Au final, ce qui importe, c’est que quelle que soit la contribution, le mouvement s’amplifie et se fasse connaître pour qu’augmentent les contribution de toute nature pour la nature. La contribution essentielle des donateurs sert à bonifier et augmenter les actions de conservation là où des besoins sont identifiés. Faisons-les sortir de l’ombre, mettons-les en lumière, valorisons leurs contributions. Ils pourront alors servir de modèles pour en inspirer bien d’autres à suivre le pas, à s’impliquer et à supporter les groupes de conservation, quelle que soit la manière dont ils le pourront.
Visualiser la vidéo réalisée par la Fiducie de Conservation des Écosystèmes de Lanaudière à propos d’un don majeur qui lui a été offert.
Dans les dernières années (2015-2017), les dons représentent 23 % des sites protégés[4].
À noter également que le plus grand don immobilier de l’histoire du Québec a été un don à vocation écologique. Il s’agit de la forêt Hereford d’une superficie de plus de 5000 ha. Le don a été effectué en 2013 par la famille de feu Neil Tillostson.
Sources
[1] ANDERSON, S. 2005. Profiles and Trends of Canadian Philanthropic, Environmental, Land, and EGP Donors.
[2] GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, 2015. La conservation volontaire; vous pouvez faire la différence.
[3]CARON, J., 2006. La conservation des milieux naturels en Estrie.
[4] Réseau de milieux naturels protégés, 2017. Répertoire des milieux naturels protégés.